Europe et gaz, le jeu de Draghi dans le dernier kilomètre du gouvernement

C’est le dernier tronçon du dernier kilomètre. Le gouvernement de Mario Draghi aura disparu dans une quinzaine de jours, 20 jours tout au plus, du moins au Palazzo Chigi. Mais avant de conclure son mandat, le premier ministre doit représenter l’Italie dans les forums internationaux : le premier a été le Conseil européen informel de Prague, qui sera suivi par le Conseil ordinaire de Bruxelles les 20 et 21 octobre. Eh bien, à Prague, Draghi a porté le coup qu’il avait peut-être préparé depuis un certain temps. Nous discutons du gaz depuis sept mois, nous avons dépensé des dizaines de milliards d’euros de l’argent des contribuables européens pour la guerre de Moscou et nous n’avons toujours rien résolu. Si nous n’avions pas perdu autant de temps, nous ne serions pas aujourd’hui au bord de la récession ». Ces mots, prononcés par Draghi à l’adresse de ses collègues, sortent du sommet du Château, et les critiques vont directement à la Commission européenne, présidée par Ursula von der Leyen, et aux premiers ministres hostiles à toute solution sur le sujet du gaz, Allemagne et Hollande en tête.

Le dossier du gaz au centre des initiatives depuis mars. Les 20-21, la décisione

Nous ne l’avons jamais vu aussi coriace », a avoué un participant à la réunion. Draghi ne cesse de répéter depuis début mars qu’il faut plafonner le prix du gaz russe, ce qui est certes difficile, mais pas impossible. Et en tout cas la seule proposition concrète, à laquelle la France s’est également jointe. Ce qu’il faut, c’est une volonté (et une compétence) politique de la part de ceux qui doivent faire preuve de courage en cas d’urgence, ce qui n’a pas été le cas jusqu’à présent. Pendant des mois, la Commission s’est opposée au plafonnement des prix, soutenue (et influencée, surtout) par l’Allemagne qui craignait de perdre ses approvisionnements au profit de Moscou. Complice également d’une indécision allemande inconnue sous l’ère Merkel, le dossier a rebondi de sommet en sommet, jusqu’à l’engagement pris en juin de présenter un plan d’ici septembre. Qui n’est pas arrivé. Seule une lettre de von der Leyen d’engagements génériques, diffusée à la veille du dernier sommet. Avec l’envolée des prix, dix fois supérieurs à ce qu’ils étaient il y a un an et demi, les choses se sont effondrées et l’on parle maintenant ouvertement de récession. D’où la position de Draghi, qui n’est certainement pas une attaque contre les institutions européennes, au contraire, c’est une demande de prise de responsabilité forte pour qu’elles remplissent pleinement leur rôle. Il reste maintenant moins de deux semaines avant le Conseil de Bruxelles des 20 et 21, qui devra prendre des décisions.

Le gaz (et la guerre), la troisième urgence du gouvernement

Pour le premier ministre sortant, la question du gaz a en effet été la troisième grande urgence à laquelle son exécutif a dû faire face – parallèlement à la guerre en Ukraine – après celle de la vaccination de la population (et de la gestion de la pandémie avec la courageuse réouverture des activités, initialement critiquée par les régions) et la mise en œuvre du Pnrr, objet de critiques de la part de Giorgia Meloni, auxquelles il a été largement répondu. On pouvait donc s’attendre à une levée de boucliers pour ramener un résultat à laisser au futur gouvernement, mais surtout parce qu’il s’agit d’une question qui concerne tout le pays, les citoyens et les entreprises.