Les opportunités du recyclage des piles

Une batterie de voiture électrique nécessite jusqu’à neuf kilos de lithium et 13 kilos de cobalt. Comme les besoins augmentent et que les matières premières se raréfient, des constructeurs automobiles comme Mercedes-Benz travaillent désormais sur des installations de recyclage pour les batteries de voitures.

Le lithium provient aujourd’hui principalement des mines australiennes et de sources souterraines au Chili. Avec 100.000 tonnes par an, ces deux pays produisent la majeure partie du lithium dont le monde a besoin. Sans ce métal alcalin, rien ne va plus dans le monde moderne. Le lithium est devenu quasiment indispensable, notamment dans la production de batteries pour les voitures électriques. Les besoins pourraient bientôt dépasser les quantités produites annuellement, notamment en raison de l’interdiction des véhicules à combustion prévue dans l’UE à partir de 2035.

Tim Diekmann

Un taux de recyclage de plus de 96

Afin de réduire les dépendances politiques et économiques vis-à-vis des matières premières telles que le lithium, le cobalt et le manganèse, le constructeur automobile allemand Mercedes-Benz se lance à son tour dans le recyclage des batteries. L’une des plus grandes usines de recyclage de batteries de voitures électriques d’Allemagne est en train de voir le jour sur le site de l’usine d’emboutissage de Kuppenheim, près de Rastatt dans le Bade-Wurtemberg.

La première pierre du projet est posée aujourd’hui. Celle-ci symbolise « l’étape décisive vers la fermeture du cycle de recyclage des batteries de Mercedes-Benz. Avec un taux de recyclage de plus de 96 pour cent, c’est une ‘mine de demain’ emblématique qui voit le jour ici à Kuppenheim », déclare Jörg Burzer, directeur de production du groupe Mercedes-Benz.

Tim Diekmann, SWR, avec des informations sur l’usine de recyclage de batteries à Kuppenheim

tageschau24 11:00 heures, 3.3.2023

Réduire les dépendances

Mercedes achète la technologie de recyclage à l’extérieur : La joint-venture germano-australienne Primobius exploite déjà une installation pilote à Hilchenbach, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Avec Mercedes à Kuppenheim, tout devrait maintenant être encore plus grand. Mais il manque encore suffisamment de matériaux recyclés, explique le directeur technologique Hans Ferkel du partenaire allemand de Primobius, SMS group.

« C’est un peu comme le principe de l’œuf et de la poule : si vous ne fournissez pas suffisamment de matières premières, la croissance dans ces produits sera naturellement faible ». C’est aussi la raison pour laquelle le recyclage des piles a joué jusqu’à présent un rôle plutôt faible en Allemagne, ajoute le chef de projet Christoph Neef de l’Institut Fraunhofer de recherche sur les systèmes et l’innovation (ISI) à Karlsruhe. Le scientifique observe les évolutions du marché dans le domaine du recyclage des piles.

« Les marchés en Chine sont beaucoup plus importants qu’en Europe. Cela signifie que les recycleurs là-bas, ont vraiment des batteries à recycler. Et aux États-Unis aussi, grâce à l’entrée précoce de Tesla sur le marché, il y a une quantité notable de batteries à recycler », explique Neef. « Ici, en Europe, nous avons certes de plus en plus de voitures électriques sur les routes, mais il manque des batteries qui devraient être recyclées. L’industrie se trouve donc encore dans une phase de développement ».

Les experts voient un grand potentiel

Une étude dont Neef est co-responsable en tant que chef de projet au Fraunhofer ISI montre à quel point le potentiel est grand : Selon cette étude, la quantité de piles à recycler en Europe passera de 420 000 tonnes en 2030 à 2,1 millions de tonnes en 2040. « C’est pourquoi je pense que l’industrie est actuellement très bien positionnée. Même si elle se plaint elle-même d’être en avance », estime Neef.

Outre Mercedes, le groupe Volkswagen fait également des recherches sur les méthodes de recyclage des batteries. Le potentiel est énorme, observe également l’expert automobile Stefan Bratzel du Center of Automotive Management à Bergisch Gladbach. « L’électromobilité doit devenir écologiquement durable. Et pour cela, une économie circulaire doit être mise en place ». Mais pour l’instant, le recyclage des batteries est surtout coûteux et peu rentable, selon Bratzel : « Je crains que toutes les entreprises ne survivent pas à cette transition, qui durera dix ans ou peut-être plus ».

Déchiqueter d’abord, prospecter ensuite

A Kuppenheim, chez Mercedes-Benz, il faut en revanche encore la force des graphiques et des animations pour comprendre ce qui doit se passer ici à partir de la fin de l’année dans l’usine de recyclage. Il est prévu de mettre en place un processus en deux étapes, que les experts décrivent comme un procédé mécano-hydro-métallurgique.

Dans une première étape, la batterie usagée est découpée en cellules individuelles, explique Hans Ferkel du partenaire technologique Primobius : « Ces cellules sont ensuite introduites dans un broyeur. Nous commençons donc par broyer les piles. C’est là que les premiers matériaux recyclables, comme le cuivre et l’aluminium, apparaissent ». Il reste ensuite ce qu’on appelle une « masse noire » : elle contient du cobalt, du nickel, du manganèse, du lithium et du graphite. « Dans une deuxième étape, cette masse est dissoute chimiquement et nous récupérons les précieux métaux », explique Ferkel. Ces produits recyclés seront ensuite réutilisés pour les batteries.

Le projet d’usine de recyclage de batteries de Mercedes en visualisation par ordinateur.

Image : Mercedes-Benz

L’objectif est un circuit fermé

Mais pour cela, il faut d’abord que la qualité soit au rendez-vous, explique Helmut Ehrenberg de l’Institut de technologie de Karlsruhe. Son équipe étudiera à l’avenir la qualité des matériaux recyclés à Kuppenheim. « Le mieux est de laisser dans le circuit les matériaux de valeur qui se trouvent une fois dans la batterie », explique Ehrenberg. « Nous devons entrer dans un circuit fermé ».

Le scientifique du Fraunhofer Neef estime que l’on est encore loin d’un véritable circuit fermé : « On ne parvient pas à recycler à 100 %. On devra toujours utiliser des matières premières primaires comme le lithium extrait. Mais dans le cas du cobalt, nous constatons que les anciennes batteries ont besoin de quantités encore plus importantes que les nouvelles. Ici, nous pourrions donc à l’avenir obtenir suffisamment de cobalt pour les nouvelles batteries grâce au recyclage des anciennes batteries ». Des batteries toujours plus efficaces rendent donc possible une économie en circuit fermé, que l’UE souhaite également promouvoir à l’avenir par des directives de recyclage plus strictes.