La capacité de l’Allemagne à passer l’hiver sans pénurie de gaz dépend également de la quantité de gaz acheminée vers les pays voisins.

La question de savoir si l’Allemagne passera l’hiver sans pénurie de gaz ni rationnement dépendra essentiellement de la quantité de gaz que les ménages économiseront pendant la période de chauffage.

Les experts de la Deutsche Bank estiment qu’il est peu probable que l’objectif nécessaire d’une économie de 20 pour cent par rapport à l’année précédente puisse être atteint. En effet, l’hiver 2021/22 aurait déjà été très doux.

Selon eux, il est d’autant plus important de savoir quelle part du gaz qui arrive en Allemagne est acheminée vers d’autres pays en vertu de contrats.

L’Allemagne souffre d’une pénurie de gaz – et pourtant elle en livre à d’autres pays. Ce qui semble être une contradiction est en fait une conséquence de l’interconnexion des gaz en Europe. Une part importante du gaz naturel qui arrive en Allemagne par gazoduc est acheminée vers des pays voisins comme la République tchèque, l’Autriche ou la France. L’importance de cette part a une grande influence sur l’éventualité d’une pénurie de gaz et d’un rationnement en Allemagne en hiver. C’est ce qu’ont souligné les experts en énergie de la Deutsche Bank dans une mise à jour de leur Gasmonitor.

Avec le début de la saison de chauffage, c’est d’abord le comportement des ménages en matière de chauffage qui est décisif, écrivent les experts de Deutsche Bank Research. En effet, pendant la période de chauffage d’octobre à avril, les ménages représentent 50 % de la consommation totale de gaz.

Les experts estiment que la réduction de la consommation de gaz de 20 pour cent par rapport à l’année précédente, considérée comme nécessaire, n’est pas réaliste. En effet, l’hiver 2021/22 aurait déjà été très doux.

Selon les économistes, un rationnement du gaz au printemps pourrait tout au plus être évité « d’un cheveu ». Pour cela, de nombreuses conditions doivent être remplies. Outre la consommation de gaz, la part de gaz arrivant en Allemagne qui est transférée aux pays voisins est importante du point de vue de l’offre. Si cette part devait être de 40% comme les années précédentes, même une réduction de 20% de la consommation de gaz conduirait à une pénurie de gaz au printemps 2023 ou à l’hiver 2023/24.

En revanche, si la part de gaz en transit tombe à 35 %, les chances de passer l’hiver avec les 20 % d’économie augmentent considérablement. Si la part de transit tombe à 30 pour cent ou plus, une réduction de la consommation de 10 pour cent pourrait suffire pour que les réservoirs de gaz ne se vident pas.

L’année dernière, selon les données du secteur, l’Allemagne a fait transiter environ 35 pour cent du gaz qui arrivait dans le pays vers d’autres pays. Le gaz arrive certes en Allemagne, mais il est destiné à d’autres pays par le biais de contrats conclus par les négociants en gaz. Il ne fait donc que transiter par le réseau européen de gazoducs à travers l’Allemagne. Le gaz apparaît dans les statistiques en tant qu’importation et est compté comme exportation lorsqu’il est acheminé. C’est par exemple de cette manière que l’Allemagne a fourni du gaz à la Pologne, qui a entre-temps rempli ses réservoirs à 100 %.

Selon des données datant de 2020 – c’est-à-dire avant la fermeture du principal gazoduc Nord Stream 1 en provenance de Russie – plus de la moitié du gaz en transit, soit 57 pour cent, était destiné à la République tchèque. Suivaient les Pays-Bas, la Suisse, l’Autriche et la France.

Un arrêt partiel ou total des exportations interférerait avec les contrats de livraison. De plus, l’Allemagne dépend de son côté des livraisons de gaz des pays voisins. Une intervention dans les opérations de transit est donc considérée comme très improbable.

Selon les experts de la Deutsche Bank, l’incertitude concernant la part du gaz en transit reste donc très élevée. Il est donc d’autant plus important, selon eux, de surveiller de près cette part. Dernièrement, la part du gaz qui ne fait que transiter était tombée à 20 pour cent. Si elle devait remonter vers 40 pour cent pendant la période de chauffage en octobre et novembre, ce serait « un signal d’alarme précoce indiquant que le rationnement du gaz sera nécessaire tôt en 2023 ».