Le théâtre Kabuki s’essaie à la science-fiction – SZ.fr

Son vrai nom est Terumasa Fujima, mais c’est moins connu. Il a fait sa première apparition sur scène à l’âge de cinq ans sous le nom de Matsumoto Kintaro III, puis il a connu tous les changements de rôles et de noms d’artistes qui caractérisent toute grande carrière de kabuki. Cette succession quelque peu compliquée fait partie de l’ordre établi du monde du kabuki. C’est le cadre dans lequel le genre conserve son identité.

En principe, tout le monde peut devenir acteur de kabuki. Depuis les années 1950, le centre de formation central est l’école d’art dramatique du Théâtre national de Tokyo. L’enseignement qui y est dispensé va toutefois au-delà du kabuki. Ceux qui sont nés dans l’une des anciennes familles de kabuki ne la fréquentent pas. Car dans les systèmes complexes de maîtres et d’élèves de ces familles, l’artisanat du kabuki, les Mie, c’est-à-dire les poses, et les techniques de parole, de danse et de maquillage, se transmettent de génération en génération. Et ici, on ne remet évidemment pas en question ce que la société du progrès remettrait tout naturellement en question. Par exemple, le fait que le kabuki ne prévoit que des hommes dans ses rôles.

Matsumoto Koshiro X. n’ébranle pas non plus cette règle. Mais quand il s’agit de plaire au public, la nouveauté l’intéresse beaucoup. Toute l’histoire du kabuki a finalement commencé par une sorte de révolte contre l’habitude. C’était au début de l’époque Edo (1603 à 1868). La prêtresse shinto Okuni du sanctuaire d’Izumo fonda alors un groupe de danseuses et présenta à Kyoto une sorte de vaudeville burlesque. Ce spectacle était très différent de l’art porté du théâtre Nō traditionnel et connut un certain succès – mais fut interdit en 1629 pour des raisons morales. Les jeunes hommes prirent le relais, mais ils furent rapidement interdits. Par la suite, des hommes plus mûrs ont fait évoluer le kabuki vers ce théâtre populaire coloré qui a mis en scène l’esprit du Japon.

Le théâtre kabuki ne veut pas bouleverser, ni même déranger

Et aujourd’hui ? Au Japon, l’harmonie fait partie de la culture dominante. On apprécie la créativité surtout lorsqu’elle donne lieu à des variantes du familier. Le théâtre Kabuki ne cherche pas non plus à bouleverser ou à déranger. Il accorde plus d’importance à l’esthétique de la représentation, à la précision des danses, à la représentation parfaite du cosmos japonais. Le théâtre privé Kabukiza doit ici répondre à des attentes claires. Mais il doit aussi penser à l’avenir. « La moyenne d’âge du public habituel est d’environ 60 ans », explique Manabu Senda, le directeur du Kabukiza. De nouvelles matières comme l’adaptation de Nausicaä doivent attirer les jeunes. Senda : « Nous adaptons le kabuki aux temps modernes ». Mais avec précaution.