Israël et le Liban se réjouissent de l’accord frontalier – Politique

Désormais, tout le monde se répand en louanges et en félicitations. Depuis les plus hautes sphères de Washington, le président américain Joe Biden a salué l’accord sur la frontière maritime entre Israël et le Liban comme une « percée historique au Proche-Orient ». Même dans la lointaine Berlin, on évoque un « succès historique ». Dans les pays concernés, la joie et le soulagement sont palpables, le Premier ministre israélien Jair Lapid parle lui aussi d’un « acquis historique ». Mais la réaction du chef de l’opposition Benjamin Netanyahu montre que l’histoire a toujours deux côtés : il s’insurge contre une « capitulation historique » – et veut encore dresser quelques obstacles avant la signature de l’accord.

Pour situer les choses au-delà des grands mots : l’accord entre Israël et le Liban est loin d’être un accord de paix entre ces deux Etats qui vivent officiellement en état de guerre depuis 1948. On s’est mis d’accord – dans le cadre de négociations indirectes sous la médiation des Etats-Unis – sur une question économique qui doit en même temps apporter des bénéfices en matière de politique de sécurité : Après de longues années de conflit sur une zone de 860 kilomètres carrés au total en Méditerranée, l’angle de la frontière par rapport à la côte a été défini.

C’est surtout important parce que la zone longtemps contestée touche deux gisements de gaz : l’un appelé Karish du côté israélien ; l’autre appelé Kana, qui peut désormais être exploité par les Libanais. Le gaz israélien peut désormais être extrait très rapidement et donner au pays une marge de manœuvre pour les exportations vers l’Europe. Dans le contexte de la guerre en Ukraine, c’est probablement l’une des raisons pour lesquelles les Etats-Unis ont exercé une forte pression pour conclure l’accord.

La taille du champ n’est pas encore claire

Du côté libanais, il faudra certainement attendre encore quelques années avant que la société française Total, titulaire d’une licence, n’explore et ne développe le gisement de Kana. On ne sait même pas si l’on peut vraiment s’attendre à de grandes quantités de gaz. Mais au milieu de la crise économique et énergétique dévastatrice que connaît le Liban, cet accord est un message d’espoir pour les citoyens. Le fait que le Liban ne dérive pas davantage vers le chaos est également important pour les voisins, raison pour laquelle le ministre de la Défense Benny Gantz a désormais souligné spécialement : « Israël a intérêt à ce que le Liban soit stable et prospère ».

Les espoirs d’Israël se concentrent sur deux effets à la fois : D’une part, le Liban doit devenir indépendant des livraisons d’énergie iraniennes et ainsi repousser l’influence iranienne. Cela pourrait également affaiblir l’arrière-cour de Téhéran au Liban, la milice chiite du Hezbollah. D’autre part, Israël mise pour l’avenir sur une sorte d’équilibre de la terreur : si deux installations d’extraction sont actives à proximité immédiate en Méditerranée du côté israélien et libanais, les deux parties ont autant à perdre en cas de conflit militaire.

C’est sur cette base que le Premier ministre Lapid estime que cet accord améliore la sécurité régionale. Ces derniers mois, le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah a présenté le scénario alternatif avec des menaces de guerre et des drones abattus par l’armée israélienne près du champ de Karich.

Pourtant, l’accord ne fait pas l’unanimité en Israël. De nombreux commentateurs ont souligné dans les médias un « processus précipité » et des concessions prétendument trop importantes faites au Liban. Et Netanyahu a une fois de plus battu le rappel en mettant en garde contre les « dizaines de milliards de shekels » qui, grâce à cet accord, iraient directement dans les poches de Nasrallah. Avant les élections législatives du 1er novembre, il ne veut en aucun cas accorder un succès au gouvernement – et tente donc d’empêcher une signature rapide. L’un des leviers pour cela est la Cour suprême, où plusieurs pétitions ont déjà été déposées pour stopper l’accord.

Le gouvernement, quant à lui, tente désormais d’accélérer les choses. Mercredi, le cabinet de sécurité réuni à la hâte par Lapid a approuvé la signature de l’accord avec le Liban. Parallèlement, et de manière plutôt inhabituelle, la Knesset a été convoquée en session extraordinaire en pleines vacances de la fête des Tabernacles. L’opposition demande avec véhémence un vote sur l’accord avec le Liban. Selon la lecture du gouvernement, qui n’a plus de majorité au Parlement, les députés n’auront que deux semaines pour examiner le texte et formuler des objections – non contraignantes.