Mis devant le fait accompli

La commission d’enquête sur l’Afghanistan du Bundestag entend aujourd’hui des témoins du ministère des Affaires étrangères. Des documents confidentiels montrent à quel point, en 2020, l’irritation était grande face à l’action solitaire de l’administration Trump.

« Entrer ensemble, sortir ensemble » – tel a toujours été le mantra de l’OTAN en ce qui concerne la mission militaire en Afghanistan. Mais de nombreux documents, qui ont été mis à la disposition du public, montrent à quel point les Etats-Unis ont parfois fait cavalier seul au sein de l’Alliance. ARD-Hauptstadtstudio et WDR Investigativ sont disponibles.

Kai Küstner

Martin Kaul

Un exemple est l’accord conclu par les États-Unis avec les talibans islamistes fin février 2020 sur un retrait des troupes occidentales, dont le gouvernement fédéral n’était pas du tout content : « J’ai communiqué mon irritation/mon besoin de clarification sur le contenu de l’accord US/TLB (réd. : talibans) », peut-on lire dans un e-mail confidentiel du conseiller de l’époque de la représentation permanente auprès de l’OTAN à Bruxelles, daté du 5 mars 2020, après un entretien avec son homologue américain.

L’homme qui a rédigé ces lignes à l’époque est aujourd’hui entendu comme témoin par la commission d’enquête. Peu avant cet entretien, après un échange informel entre le ministère des Affaires étrangères, le ministère de la Défense et la Chancellerie à Berlin, on s’était mis d’accord sur la ligne à suivre : « Le mécontentement vis-à-vis de l’accord avec les talibans américains devait être communiqué aux Etats-Unis par les voies appropriées ». C’est ce que l’on peut lire dans une note confidentielle de l’unité de l’OTAN au ministère des Affaires étrangères sur l’entretien, également datée du 5 mars.

« Nouvelle sortie du consensus »

Mais ce n’est pas seulement avec l’accord sur les talibans que les États-Unis, alors dirigés par le président Donald Trump, ont mis les Allemands et leurs autres alliés devant le fait accompli. Ceux-ci ont également été surpris en 2020 par des annonces de retrait de troupes toujours nouvelles et non concertées. « Les États-Unis sont ainsi sortis une nouvelle fois du consensus convenu, contrairement aux engagements pris jusqu’à présent et à la décision de l’OTAN », peut-on lire par exemple dans un document du ministère des Affaires étrangères du 19 novembre 2020 – peu après que l’administration Trump a annoncé vouloir réduire le nombre de troupes américaines à 2500 d’ici la mi-janvier 2021.

L’Allemagne a cependant toujours essayé d’insister pour que la décision de retrait soit obligatoirement liée à des conditions – comme la poursuite des pourparlers de paix avec les talibans à Doha – et à la situation en Afghanistan, et non à des échéances prédéfinies.

L’état chaotique de l’alliance de l’OTAN

La communication jette une lumière consternante sur l’état chaotique dans lequel se trouvait l’Alliance de l’OTAN à l’époque. Et le peu de considération que l’administration Trump avait manifestement pour l’Allemagne et les autres alliés en ce qui concerne l’Afghanistan.

Ce n’est un secret pour personne que la communication a de nouveau changé avec l’entrée en fonction de Joe Biden. Le nouveau président américain a toutefois maintenu la décision de Trump de retirer toutes les troupes d’Afghanistan. Avec les conséquences que l’on connaît.