La mort des poissons est probablement due aux exploitations minières

La mort des poissons de l’Oder est apparemment due aux rejets de sel des exploitations minières polonaises. C’est ce que révèle une enquête de Greenpeace, qui a été transmise au SWR et le « Tagesspiegel ». L’accent a été mis sur les affluents où les entreprises déversent leurs eaux usées.

Les images de la mort dramatique des poissons dans l’Oder ont fait le tour du monde l’été dernier. A l’époque, une partie importante de la population de poissons et de nombreuses autres espèces animales avaient péri. Pendant longtemps, on n’a pas su ce qui avait conduit à cette catastrophe écologique.

Cela pourrait désormais changer. Ces dernières semaines, des scientifiques de Greenpeace Pologne ont effectué à plusieurs reprises des analyses d’eau dans le sud de la Pologne. Ils viennent de présenter un rapport qui a été transmis au Tagesspiegel et au SWR est disponible en exclusivité.

Selon ce rapport, les responsables sont plusieurs entreprises de l’industrie houillère de la région de Silésie, qui déversent de grandes quantités d’eau salée dans les affluents de l’Oder. Les spécialistes de l’eau s’accordaient depuis longtemps à dire que des taux de salinité inhabituellement élevés en été avaient entraîné la prolifération d’une espèce d’algue toxique (Prymnesium Parvum), à l’origine de la mort des poissons. Seule l’origine du sel n’était pas claire jusqu’à présent.

L’eau salée problématique provenant de l’exploitation minière

Les affluents de l’Oder, dans lesquels les exploitations minières déversent leurs eaux usées, ont été au centre de l’enquête actuelle de Greenpeace. La région compte de nombreuses mines de charbon. Celles-ci pompent sans cesse de très grandes quantités d’eau dans les galeries afin de pouvoir y travailler. On sait que cette « eau de pompage » peut être très salée, selon les régions.

Les scientifiques de Greenpeace ont prélevé à plusieurs reprises des échantillons d’eau autour des exploitations minières et les ont analysés. Les plus fortes concentrations de sel ont été relevées dans les affluents de l’Oder Klodnica, Bierawka et Potok Bielszowicki, où se trouvent plusieurs mines de charbon.

Greenpeace enquête sur les causes de la mort des poissons dans l’Oder : une forte salinité due aux mines de charbon

Nick Schader, SWR, tagesschau 17:00, 2.3.2023

Selon le rapport d’enquête, une image claire s’est dégagée à cet égard. Alors que les teneurs en sel étaient très faibles en amont, les teneurs en sel augmentaient massivement à partir des points de rejet des exploitations minières. En plusieurs endroits, la concentration en sel était même supérieure à celle de l’eau de mer. Les toxicologues de Greenpeace sont certains que ces sels ont entraîné une prolifération massive des algues toxiques.

Christian Wolter, spécialiste de l’écologie des poissons à l’Institut Leibniz d’écologie aquatique et de pêche intérieure (IGB), s’est félicité dans un entretien avec le SWR l’enquête de Greenpeace : « Il était important que des échantillons soient prélevés aux points de rejet afin d’identifier clairement les pollueurs. Les résultats de ce rapport confirment ainsi ce que l’Institut Leibniz d’écologie aquatique et de pêche intérieure souligne depuis longtemps : Les conditions optimales de croissance de l’algue toxique, c’est-à-dire la forte concentration de sel dans l’Oder, ont été provoquées par l’homme ».

« Maladie chronique »

La plus grande entreprise minière polonaise, Polska Grupa Górnicza (PGG), qui exploite la plupart des mines du bassin, a répondu aux questions du SWR malgré des demandes répétées. Interrogée, l’entreprise JSW SA, qui y exploite une mine, a déclaré : « Le rejet d’eau salée dans l’environnement repose sur des autorisations délivrées par les autorités compétentes. De nombreuses vérifications ont été effectuées et aucune irrégularité n’a été constatée ».

Le ministère polonais de l’Environnement a répondu à des questions concrètes du SWR non plus – s’est contentée de communiquer de manière générale sur ses contrôles de l’eau : « Le laboratoire central de recherche pour la protection de l’environnement effectue des tests et des mesures, y compris des prélèvements d’échantillons, à des fins de contrôle et de surveillance de l’environnement par l’État. Dans ce cadre, des échantillons de l’eau de l’Oder sont actuellement prélevés deux fois par semaine sur 20 sites de mesure et d’analyse ».

Si l’on se penche sur les résultats de mesure des autorités polonaises disponibles publiquement, on y trouve aussi régulièrement des dépassements des valeurs limites de salinité. A ce sujet, le ministère polonais de l’Environnement, qui parvient à des conclusions similaires à celles de Greenpeace, écrit : « Les teneurs en sel les plus élevées sont observées dans le cours supérieur du fleuve, où sont déversées des eaux souterraines provenant de l’extraction du charbon ».

Dietrich Borchardt, hydrobiologiste du Centre Helmholtz pour la recherche environnementale (UFZ), avertit depuis longtemps que l’Oder est « chroniquement malade » : « Ce dont l’Oder a besoin maintenant, c’est d’une surveillance conséquente des rejets, couplée à d’autres mesures pour renforcer la résistance de l’écosystème fluvial. Nous avons déjà vu dans d’autres cas graves, comme celui du Rhin, que les rivières peuvent ainsi se rétablir ».

Greenpeace met en garde contre d’autres catastrophes écologiques

Greenpeace Pologne met en garde contre le fait qu’une telle catastrophe environnementale pourrait se reproduire. De plus, les rejets massifs d’eau salée de l’industrie minière n’ont pas seulement affecté l’Oder, mais aussi la Vistule. Dans son rapport final, Greenpeace demande donc aux autorités environnementales polonaises d’agir. Des contrôles environnementaux immédiats devraient être effectués dans les entreprises minières, les quantités d’eaux usées devraient être réduites et des installations de dessalement devraient être installées.

On ne sait pas encore si les autorités environnementales polonaises vont agir, ni comment, puisque les résultats de l’enquête de Greenpeace Pologne n’ont été publiés qu’aujourd’hui. Mais la pression devrait augmenter.

Christian Wolter, expert en pêche à l’institut Leibniz : « Nous espérons qu’en coulisses, au niveau politique, on travaille déjà à des solutions telles que des bassins de rétention ou la fixation d’une valeur limite écologiquement acceptable sur une base scientifique ». Il est urgent de réduire les rejets pour éviter que la catastrophe écologique de cet été ne se reproduise.