À travail égal, salaire égal ?

Une décision de justice rend difficile pour les employeurs de payer les femmes moins bien que les hommes pour le même travail. Le principe de l’égalité de rémunération s’applique. Ceux qui veulent y déroger doivent avoir de bons arguments.

On peut lire dans la littérature spécialisée qu’il s’agit d’une « étape importante » : Jeudi dernier, la Cour fédérale du travail (BAG) a décidé que les différences de salaire entre hommes et femmes ne pouvaient pas être justifiées sans autre par une « meilleure capacité de négociation » de l’homme. Les travailleuses ont le droit de recevoir le même salaire que leurs collègues masculins pour un travail de valeur égale.

Christoph Kehlbach

Une femme qui travaillait comme représentante commerciale dans une entreprise et qui recevait un salaire mensuel inférieur à celui de son collègue masculin a porté plainte. Tous deux occupaient le même poste dans l’entreprise et avaient été embauchés à quelques mois d’intervalle. Pourtant, l’homme gagnait nettement mieux sa vie. Selon l’entreprise, c’est notamment parce qu’il avait « mieux négocié ». L’employée a porté plainte – avec succès.

Elle avait certes perdu dans un premier temps dans les instances inférieures. Mais la Cour fédérale du travail lui a finalement accordé un rappel de salaire et une indemnisation pour la discrimination sexuelle subie. L’argument « mieux négocié » n’a pas été retenu par les juges suprêmes du travail en Allemagne.

Un salaire moindre, une discrimination présumée

Un salaire égal pour un travail égal – indépendamment du sexe. Ce droit trouve son origine dans la législation européenne. « Chaque État membre assure l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur », stipule le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). L’Allemagne l’a fait par le biais de dispositions correspondantes dans la loi sur la transparence des rémunérations. Le principe de l’égalité de rémunération s’applique : pour un travail de valeur égale, la rémunération d’un (ou d’une) salarié(e) ne peut être inférieure à celle d’un (ou d’une) salarié(e) d’un autre sexe en raison de son sexe.

La loi générale sur l’égalité de traitement (AGG) renforce encore cette idée : si des indices laissent supposer une discrimination, l’employeur doit prouver qu’il existe d’autres motifs d’inégalité de traitement – et non le sexe. Dans son jugement, le BAG a été clair : si des hommes et des femmes occupant le même poste reçoivent un salaire différent, il est présumé qu’il s’agit d’une discrimination interdite fondée sur le sexe.

Les employeurs peuvent certes réfuter cette présomption, mais le simple fait d’invoquer les meilleures compétences de négociation du collègue masculin n’est pas une raison valable. L’arrêt peut avoir un impact important sur l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes. Il pourrait contribuer à modifier la manière dont les salaires sont négociés et à combler ainsi le « gender pay gap », c’est-à-dire l' »écart » entre le salaire moyen des femmes et celui des hommes.

Il doit y avoir des raisons objectives

La grande pertinence pratique de l’arrêt d’Erfurt réside dans le fait que les employeurs devront à l’avenir donner des raisons objectives s’ils veulent payer une femme moins qu’un homme occupant le même poste. Si la décision de la Cour fédérale du travail avait été différente, une référence à l’habileté individuelle à négocier aurait été plus suffisante pour justifier la dérogation au principe de l’égalité de rémunération.

Avec cet arrêt, le BAG pose toutefois les jalons pour que le salaire en général soit moins déterminé par l’habileté de négociation et que l’on se concentre davantage sur l’égalité de traitement des différents sexes. Une différence de traitement dans la rémunération des hommes et des femmes ne peut être fondée que sur des critères objectifs : Par exemple, de meilleures qualifications ou une plus grande ancienneté des candidats.

Néanmoins, il ne sera pas impossible à l’avenir que des différences salariales individuelles existent légitimement. L’employeur doit toutefois justifier de manière compréhensible le fait qu’il verse un salaire différent pour de telles raisons objectives. Cela peut par exemple être le cas s’il n’aurait pas pu pourvoir le poste vacant autrement. Comme l’a déjà décidé la Cour fédérale du travail en 2021, une expérience professionnelle plus longue du collègue peut également constituer une raison objective de payer plus. Cela dépendra donc à l’avenir également du cas concret.